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            Préface

 

 

Pas si anodin de plonger dans les mémoires d'une amie rencontrée il y a exactement trente et un ans, sentiment un peu flou entre réalité du récit bien vivant qui se mêle au temps passé…

Le temps révolu d'une vie qui, pour moi lectrice et sans doute pour tous les expatriés qui te liront, fait ressurgir une vie un peu à part, un esprit lui aussi un peu particulier que nous trouvions finalement des plus normaux, nous étions si nombreux (français, étrangers) à vivre ces quotidiens loin de nos attaches.

C'est en rentrant au bercail que nous avons réalisé combien nous étions quelque part un peu démunis, un peu nus.

Riches, très riches dans nos mémoires porteuses de toutes ces années de découvertes, de personnes aimées, laissées le cœur lourd derrière nous au fil de nos vagabondages, de pays adoptés puis abandonnés.

Nous les portons ces années et les porterons jusqu'au bout, elles sont devenues presque nos jardins secrets où nous allons gambader de temps à autre le sourire aux lèvres de toutes ces images qui défilent, viennent nous surprendre si présentes, émouvantes, pour bercer nos nostalgies parfois mélancoliques jamais guéries, et par raison acceptées.

Mais comment as-tu fait ?? Oui, tu le dis, tes carnets, les lettres, mais quand même.

J'ai été subjuguée par ta mémoire des détails. Tant d'années à raconter entre déménagements, travail, rencontres, vacances, voyages/découvertes, joies, chagrins, soirées, moments amicaux, moments amoureux...

Et tu l'as fait, bravo.

Bravo pas uniquement pour ton récit si vivant donnant l'impression que ce foisonnement intense vient juste de se dérouler, faisant fi de ces décennies écoulées, mais aussi pour le rythme qui emporte à travers ton enthousiasme de cette vie choisie.

Bravo aussi pour avoir sans doute bravé les interrogations et inquiétudes de tes proches, peut-être incrédules, et fait face à "mais pourquoi part-elle si loin de nous, elle est pourtant bien notre vieille France" ?

Bravo, car en te lisant je réalise qu'à notre génération, peu de femmes ouvraient cette grande porte de l'inconnu, bouclaient leurs sacs pour partir seules, une gageure d'autant qu'elles étaient parfois regardées un tantinet du coin de l'œil, un peu des incongrues dans ce monde d'hommes expatriés, accompagnées de leurs épouses bridgeuses et artistes occasionnelles de la peinture sur soie pour beaucoup !!!

Vous les femmes seules dont les épouses d'expatriés se méfiaient comme de la peste, vous étiez précurseuses, car partir à deux ne représente pas le même élan.

Il faut tout assumer seule dès le sac posé sur une nouvelle terre, le toit, le boulot, et autres moult détails matériels à gérer et organiser, assumer les premières soirées et week-ends seules avant d'arriver à lier des amitiés.

Par ton enfance, ta jeunesse, les clés du lointain, de l'ailleurs, ne t'avaient pas forcément étaient léguées, c'est pourquoi ce récit de tes années au loin est d'autant plus intéressant, chargé de cette dynamique d'une vie choisie et si pleinement assumée.

Certes, comme toutes vies, déboires, soucis, moments de tristesse, tels des petits cailloux inexorables sont venus jalonner ton chemin au loin, et ce qui m'a frappé et qui fait partie du plaisir de la lecture, c'est que ni les regrets, pas plus que les découragements, les désillusions ne font partie du tempo de tes souvenirs.

On est emporté par ton plaisir à revivre et faire partager cette vie que tu as choyée en la parcourant avec engouement, gourmandise du lendemain à découvrir, et à faire vibrer au mieux.

Alors, encore bravo pour ce travail de mémoire, mais qui, en fait, malgré la charge de concentration, de temps dévolu qu'il représente, n'est venu en rien perturber une forme de légèreté, comme de fluidité du récit. Les pages se tournent, pimentent la curiosité pour aller plus avant, et malgré le poids loin d'être négligeable, le pavé ne tombe jamais des mains.

 

Brigitte Bernier (extrait d'un email personnel envoyé à l'auteure après lecture de l'ouvrage)

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